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19 juillet 2012 4 19 /07 /juillet /2012 12:28

inquisitio

 

 

  Le taulier profitant enfin de vacances bien méritées d'une pause avant une nouvelle audience encore, il en profite pour vous tenir au courant de la vraie saga de l'été (celle à côté de laquelle Inquisitio ressemble à une dicussion dans le fumoir d'un club anglais) : la concertation sur la refondation de l'école. Des cris, des excommunications, des procès en sorcellerie, des expérimentations en torture sur élève innocent, des constantes macabres, des directeurs de CIO... Tous les ingrédients sont réunis pour vous faire frissonner jusqu'à fin septembre.

 

  Alors en vrai ça se passe bien et calmement, sous la férule de Mme Belzébuth, franchement compétente dans ce rôle, avouons-le. De temps en temps, on frissonne quand même un peu quand le SE-UNSA veut rendre obligatoire le travail en équipe des professeurs (et là, on se croirait vraiment dans Inquisitio) ou quand n'importe quel membre de l'association nationale des directeurs de CIO1 ouvre la bouche (et là, on est davantage chez Sainte-Anne que chez saint Ignace de Loyola), mais même la constante macabre d'André Antibi2 ne parvient pas à susciter l'effroi. 

 

  Jusqu'à présent, nous avons pu évoquer dans mon groupe le socle commun et le lycée de la réussite. Conclusion rapide : le socle n'est pas commun, et la réussite attendra. Si je développe un peu, nous avons entendu énormément d'interventions contetant les mots « expérimentation », « projet », « interdisciplinaire », « modularité », « compétences » et autres billevesées. On ne sait toujours pas exactement ce qu'est le socle commun, mais ça n'empêche pas d'affirmer qu'il doit être pour tous3 et de discuter de son évaluation. Certaines associations innovantes n'hésitent à vouloir mettre tout et n'importe quoi dans le socle (plus c'est gros plus ça passe, doivent-elles se dire), et on utilise davantage notre temps à disserter sur le sexe des anges sur la terminologie (cékoi une kompétence ? « socle » ou  « tremplin » ? « programmes » ou  « curricula5 » ? « rudimentaire » ou  « élémentaire » (mon cher Watson) ?) qu'à parler des contenus et des méthodes (sauf pour dire qu'il faut expérimenter de l'interdisciplinaire, vous l'aurez compris). 

 

  Quant au lycée, on nous a bien fait comprendre qu'on ne changerait pas grand chose et qu'il ne fallait surtout pas parler du Bac. Alors on s'occupe comme on peut autour du nouveau graal du pilotage et de la gouvernance réunis : le « bac-3/bac+3 », qui doit révolutionner notre système (ou peu s'en faut), si possible avec des ordinateurs et des projets. Cela a donné 2 réunions sur 3 brouillonnes, floues et franchement peu constructives.

 

  Mais le taulier ne désespère pas complètement : il établit des contacts, ose quelques prises de parole inattendues et lance deux trois gros mots tels que « élite » ou « disciplines » afin d'éviter aux gens la sieste post-déjeuner. Je vais tenter « estrade » et « tables de multiplication » la prochaine fois, tiens : le mot-à-caser-en-réunion, une alternative intéressante au jeu du bingo bla-bla pour éviter l'assoupissement.  

 

  Alors, est-ce que tout cela sert vraiment à quelque chose. Il est trop tôt pour le dire ; on ne se fait pas d'illusions ; mais il est possible qu'à la marge, quelques idées soient picorées par-ci par-là. Alors faisons en sorte que ce soient des idées pas trop délirantes.     

 

 


1. Leur site. Attention, site web 2.0 0.2.

 

2. Le site de son association (site web 0.2 lui aussi : attention aux yeux !). Aussi surprenant que cela puisse paraître, les interventions du monsieur, quand elles sont déconnectées de sa marotte, sont souvent pertinentes, et nous nous sommes même découvert plusieurs points d'accord. Comme quoi, à défaut de châtier l'hérétique, cette concertation fait des miracles. 

 

3. À certains moments néanmoins, des interventions au sujet des SEGPA4 ou de l'enseignement agricole ont jeté le trouble dans cette belle unanimité, rappelant que si on construisait un socle pour tous, il devait également s'appliquer à eux. Et là, soudainement, on met beaucoup moins de choses à l'intérieur. 

 

4. Section d'Enseignement Général et Professionnel Adapté (pour les enfants présentant des difficultés d'apprentissages graves et durables).

 

5. Un curriculum, des curricula. C'est le mot du moment, sans lequel il n'est pas de réunion sérieuse à l'Éduc'Nat'. Quant à savoir ce que ça recouvre exactement, la réflexion n'a pas encore abouti, mais on ne désespère pas de comprendre le concept d'ici la fin de la concertation.

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26 août 2011 5 26 /08 /août /2011 20:59

zodiaque

Été 2004 : un grand moment, une grande année !

 

 

Dans les épisodes précédents : René, sous antidépresseurs, a failli aux objectifs fixés par le stagiaire, Sylvain, dont personne ne sait qu’il en est à l’origine. Pour se faire pardonner, il accepte de participer à un projet visant à améliorer sa performance et atteindre le 6σ. La bataille des spécifications commence.

 

 

Le Souffle de l'entreprise

Une saga de Josée Dayan, avec Pierre Arditi (René), Laurence Boccolini (Cindy), Lorànt Deutsch (Sylvain), Romain Duris (Stéphane). Musique du générique : André Manoukian.

 

Épisode 3 : René sur orbite

 

  Grand moment de la vie de consultant après les processus, la gestion de projet est au consultant ce que Star Wars est cinéma : à peu près tout1. Hérité du fonctionnement du projet Apollo2, la gestion de projet se résume à pleins de responsabilités dans tous les sens, ponctuées par des livrables aussi précis et fiables que l’avenir de la Grèce… et ne se résume donc pas ! En bon consultant, je vous propose tout de même — parce que je suis sympa — le schéma suivant pour comprendre : LE CYCLE EN V !

L6s1

 

  Analysons donc : le premier bras avant la réalisation représente la conception tandis que le deuxième bras représente les tests après réalisation. Un premier acteur, le métier, fait « son expression de besoin métier » (parce que « Cahier des charges » ça fait ringard) : « Je veux quelque chose que fait ceci ou cela ». Les consultants le traduisent ensuite aux développeurs : « Le monsieur veut un système informatique comme ça » qui eux-mêmes se le traduisent pour dire ce qu’ils vont faire : « Ok ! on va faire ça alors ». Après réalisation, chacun réalise ses tests pour valider.

  Mais attention cher lecteur, car de même qu’il existe des Black Belts du lean six sigma que nous avons eu au précédent épisode, il existe aussi des Black Belts des « méthodes agiles » où tout le monde fait un peu de tout la main dans la main. Pour faire court, j’en pense à peu près la même chose qu’une méthode où un élève s’auto-évaluerait pendant que les professeurs auraient à apprendre d’eux mais c’est une longue histoire et toute ressemblance avec un sujet traité 15 fois sur ce blog serait bien évidemment fortuite !

 

Générique : « Dans les couloirs, dans les bureaux / Parfois il ne fait pas très beau / L'open space vit une dépression / L'orage gronde à la réception / Sens-tu ce parfum, cette brise ? / C'est le souffle de l'entreprise./ Et s'il t'emporte loin d'ici / Tu s'ras à Pôle Emploi mardi. »

 

 

  René se réveille. Comme beaucoup d’autres, il est en réunion et n’a pas vu le temps passer. Autour de lui, une guerre sévit. Alors que Cindy tente de savoir si Sylvain a une petite amie dans sa faculté, les consultants se déchirent sur l’ordre du jour. Steven, Green Belt des méthodes agiles, ne comprend pas comment, au XXIème siècle, on en est encore à utiliser des méthodes de projet datant du projet Apollo. Mike, son supérieur, lui dit que c’est à cause de gauchistes comme lui que la France est endettée. Le débat n’en finit plus. Steven claque la porte et quitte la réunion. Mike demande alors à René, pour clôturer la réunion, de formaliser son expression de besoin dans les plus brefs délais, sans quoi le projet « glissera » et prendra du retard, ce qui rendra René encore moins performant.

  René suggère toutefois d’y impliquer Sophie et Stéphane, deux autres employés du service livraison. En effet, le point de vue de Steven comme quoi tout le monde — même ceux qui n’ont rien à voir — doit participer au projet le séduit. Mike abonde dans son sens : René étant le client, il faut parfois lui donner ses petites victoires pour le motiver. René sort, bien décidé à faire son expression de besoin comme il faut.

  L’initiative aurait pu être bonne si Cindy n’avait pas d’autres projets pour René. Ayant couché avec Stéphane, elle dispose d’un levier de négociation sur lui : il fera donc tout pour saboter le projet de René. Stéphane, loin d’être bête, propose donc la méthode agile suivante : René fera l’expression de besoin. Lui et Sophie réaliseront les tests métier, pour bien s’assurer que René n’a rien oublié. René accepte et se débarrasse de son expression de besoin parce que c’est pas le tout, mais il doit quand même bosser. Et gare à lui si on s’aperçoit qu’il se sert du projet pour dire qu’il n’a plus le temps de faire son travail au quotidien et plomber une fois de plus les résultats !

  René vient sans le savoir de commettre une terrible erreur ! En effet, tout ce qui n’est pas spécifié et détecté pendant les tests métier sera considéré comme une évolution et facturé à l’entreprise qui verra alors les coûts du projet exploser. Au moment où il s’en rend compte, tout est déjà terminé, la machine du cycle en V est déclenchée :

L6s2

 

  Une fois de plus, c’est un échec : Stéphane et Sophie ne comprennent pas comment tester l’outil d’un métier qui n’est pas le leur. Les plannings glissent, les coûts explosent : tout est foutu. Il faut donc trouver des coupables. Mais qui ? Forcément pas Cindy puisque c’est elle qui paye les consultants. Sylvain est la cible idéale désignée par René. Malheureusement, c’est l’heure du coming out : Sylvain est le père de l’enfant de Rachida Dati. René est blême. Alors qu’il se tourne vers Stéphane, ancien consultant, il se fait piéger par celui qui connait mieux les rouages que lui : « Nous avons fait tout ce que nous avons pu avec Sophie. Cependant, nous n’avons pas participé aux phases amont du projet qui nous auraient permis de challenger les points durs des processus et les anomalies de spécifications qui auraient évité tous les développements spécifiques ». Echec et mat. René n’a rien compris3, mais il sait qu’il est cuit.

  Mike propose alors un plan d’action : si le précédent a foiré, c’est que le métier ne s’est pas assez impliqué dedans, ce qui dénote un problème de conduite du changement. Les Hommes et parties prenantes n’ont pas compris le projet et ne se le sont pas assez approprié. C’est donc la méthodologie du «  change management » qu’il va falloir appliquer.

  Moralité de l’histoire : nous ne terminerons pas cet épisode par la morale des animaux malades de la peste, mais la prochaine fois, René prendra garde à être plus ami avec Stéphane et Sylvain, même s’il n’a pas les atouts de Cindy !

 

La méthodologie de change management sonnera-t-elle le glas de René ? Stéphane arrivera-t-il par son kung fu mental à déjouer les plans de la maléfique Cindy ? Steven prépare-t-il un coup ? Suite au prochain épisode…

 

 


1. Cette opinion n'engage évidemment que l'auteur de l'article, et pas du tout le propriétaire du blog.


 2. D'où le titre habile de l'épisode ! 

 

3. Il n'est pas le seul ! 

 


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14 août 2011 7 14 /08 /août /2011 11:30

miroir

Été 2004 : il paraît que c'était formidable !

 

 

 

 

Dans les épisodes précédents : le torchon brûle entre Laura, durement réprimandée par toute sa hiérarchie pour son inefficience, et Julien, dont les pratiques en matière d'évaluation sont sujettes à caution. Et comme le niveau de Kévin-Edward est décidément  au ras des pâquerettes, le principal du collège Philippe Meirieu, M. Bota, fait appel à un1 consultant en Socle Commun : Hubert Bonimenteur de la Belt, Ceinture Noire en Socle Commun2.


Les Professeurs foudroyés (saga de l'été 2021)

Une saga de Bruno Julliard, avec Lorie (Laura), Jordy (Julien), Loana (Mme Zutlu), Kad Merad (M. Bota), Jean Dujardin (Hubert Bonimenteur de la Belt).

Musique du générique : Christophe Maé

 

 

Épisode 2 : Le Socle ceinturé

 

Générique : « L'orage a frappé le collège / Les éclairs se mêlent à la neige / la bourrasque des sentiments / Souffle et tout le monde se ment / Dans cet univers déchiré / Vois les professeurs foudroyés / Amour, savoir et trahisons / Et nuages à l'horizon » (rajoutez quelques "da da da dam, whoho !", puisque c'est Christophe Maé qui chante) 

 

 

 

 

  Hubert est formel. Après avoir identifié les problèmes, il propose d'utiliser la méthode du Lean Six Sigma afin optimiser la performance du collège Meirieu de Sainte-Geneviève-des-Bois en matière de validatiion du DNSC3. Il a organisé pour cela un atelier pour définir l’objectif le premier samedi matin des vacances de Noël, c'est-à-dire le 4 janvier4


  Hélas, Laura avait justement prévu d'aller voir son petit ami Frédéric, qu'elle a rencontré lors de ses études à Toulouse, et qui a le malheur d'habiter toujours la ville rose, où il termine une thèse en sciences de l'éducation sur la mise en activité des élèves par les projets interdisciplinaires utilisant les TICE, et bosse accessoirement dans l'exploitation viticole paternelle pour ne pas se retrouver à la rue, sa demande de bourse ayant été refusée car le dit père gagnait 100€ de plus que le SMIC5. Bref, les billets de train non remboursables sont déjà pris, et c'est donc Julien qui représentera l'équipe de lettres et arts6à la réunion. Laura espère secrètement qu'il s'y fera mal voir, tout en craignant qu'il prenne des engagements intenables au nom de toute l'équipe.

  Il faut savoir que Julien a légèrement les dents qui rayent le parquet et qu’il aime les défis. N’ayant de toute façon jamais rien compris au grec7, il propose avec le consultant de se fixer une tolérance ΔX de deux compétences non validées. Mme Zutlu, la principale adjointe, ayant bien vu que Laura n’a pas participé à la réunion pendant qu’elle-même y faisait du pied à Julien, a bien compris que l’objectif ne serait pas atteignable. Pour ceux qui ont suivi, cela revient en effet à dire que la méthode sera réussie si l’écart type est d’un tiers de compétence (σ=ΔX/6), ce qui ne veut absolument rien dire, mais on n'est plus à ça près à l'Éducation Nationale. Elle décide donc de prendre un congé-formation proposé par le PAF — « gestion du personnel et point de croix » — pendant la période d’observation. Laura, trop occupée à apprendre à Kévin-Edward à distinguer la lettre « e » de la lettre « f » (elles sont côte-à-côte dans l'alphabet, donc Kévin-Edward les confond sans arrêt), n’a pas le temps de remplir les grilles de compétences, et pour cause : elle vient de se rendre compte qu'en fait, Kévin-Edward ne savait pas écrire avec un stylo8. Une semaine plus tard, les résultats sont terrifiants ! On obtient alors ceci :

 

  « C’est terrible, s’exclame la ceinture noire du lean six sigma, votre établissement ne réalise même pas un objectif de deux sigma : la tolérance de deux compétences ne sera jamais atteinte ! ». Ne comprenant pas grand-chose à ce schéma, dont on se demande même parfois si le consultant l’a bien compris lui-même, Mme Zutlu acquiesce : « Effectivement ! A chaque fois que je pars en vacances formation, nous ne tenons pas le objectifs de var… de sig… enfin, quels que soient leurs noms, nous ne les tenons pas ! » 

  Le verdict est implacable : Laura n’est pas capable de tenir seule les objectifs. Quand celle-ci rétorque que c’est Julien qui les a fixés, tout le monde lui rit au nez. « Il les a tenus, lui : tous ses élèves sont validés à 110% ! Pourquoi vous, vous n'y arrivez pas ? », lui réplique le principal. 

  La solution est simple : il va falloir mettre en place un projet, en collaboration avec l'IUFM et le personnel d'entretien, dirigée par M. Lavetout, pour pallier l’incompétence de Laura. Cette fois, ce seront le cycle en V et les méthodes agiles qui permettront à Hubert de remplacer Laura par un système plus performant.

  Morale de l’histoire : la prochaine fois, Laura se fixera elle-même ses propres objectifs plutôt que d'aller voir son petit ami qu'elle n'avait pas vu depuis 4 mois (une bonne boîte d'antidépresseurs lui permettra de tenir facilement le coup). Ça lui évitera de ne pas répondre à ceux imposés par quelqu’un d’autre !


  Laura arrivera-t-elle cette fois à déjouer les méthodes d'Hubert et à faire payer Julien ? Mme Zutlu parviendra-t-elle à mettre en place une méthode agile avec ce dernier ? M. Lavetout utilise-t-il vraiment de la Javel pour désinfecter les toilettes de la salle des profs ? Ne manquez pas le prochain épisode des Professeurs foudroyés !

 


 


1. Oui, à l'Éduc' Nat', on n'a pas les moyens pour en faire venir plusieurs à la fois. 


2. Certifié par le Ministère de l'Éducation Nationale après une formation d'une journée.  

 

3. Diplôme National du Socle Commun. Relisez le premier épisode, que diable !

 

4. Les rythmes scolaires ont été « redéfinis » en 2016, et toutes les vacances sont désormais zonées.

 

5. Ça va, vous vous y êtes retrouvé, dans la phrase ?

 

6. Les professeurs d'éducation musicale et d'arts plastiques ont été supprimés en 2018, et l'enseignement de ces disciplines a été intégré aux programmes de français. 

 

7. Il a suivi un cursus uniquement en sciences de l'éducation, et a ainsi obtenu le CAPES général, qui permet de devenir professeur de la matière de son choix.

 

8. Il a en effet suivi son Primaire dans l'établissement expérimental Bill Gates, où chaque élève utilise exclusivement l'ordinateur.

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10 août 2011 3 10 /08 /août /2011 09:12

 

rivière

Été 1995 : étiez-vous devant votre poste ?

 

 

 

 

Dans les épisodes précédents : René, dupé par sa chef Cindy dont il est secrètement amoureux, mais qui elle-même est irrésistiblement attirée par Sylvain, un jeune stagiaire fringant, s’est vu diviser son salaire par deux pour cause d’inefficacité. Seulement la performance de l’entreprise Ordi+© n’est toujours pas au rendez-vous. Les dirigeants décident donc de faire à nouveau appel aux consultants.


Le Souffle de l'entreprise

Une saga de Josée Dayan, avec Pierre Arditi (René), Laurence Boccolini (Cindy), Lorànt Deutsch (Sylvain). Musique du générique : André Manoukian.


Épisode 2 : Le sigma de la discorde


  Nous avions vu la dernière fois ce qu’était un processus et un indicateur de performance. Voyons aujourd’hui comment améliorer tout ça. Pour cela, une méthode déposée par Motorola peut très bien faire l’affaire : le Lean Six Sigma. Le nom est anglais, sonne bien et est compliqué  à dire : c’est parfait. Le principe est définir un objectif (exemple : temps de livraison en 3 jours, en moyenne 2 fautes d’orthographe sur une copie…) et de centrer au maximum les résultats sur cet objectif. L’écart type des résultats est appelé — pour ceux qui ont oublié leurs cours de maths de Terminale1 — sigma (σ). Sur une courbe, voilà ce que ça donne, avec n(X) le phénomène observé et µ la moyenne à atteindre : 

 

Le lean six sigma


  Si l’erreur tolérée sur un objectif est de ΔX, on dit que l’application de la méthode lean six sigma est un succès lorsque ΔX=6σ. D’où le nom de la méthode dont le but est de mesurer et diminuer le sigma en question2.

  Ce qui est amusant, c’est que selon votre degré de maîtrise de la méthodologie et des formations que vous aurez passées pour dominer la chose, vous obtiendrez des ceintures, comme au judo (véridique). Ainsi, les Green Belts (ceintures vertes !) sont les padawans de la méthode, tandis que les Black Belts (ceintures noires, tadam !) sont les maîtres Jedis3 de la technique. Un grade de champion existe également pour ceux accrédités pour donner des formations sur le sujet. Mais revenons à nos moutons : 


 

Générique : « Dans les couloirs, dans les bureaux / Parfois il ne fait pas très beau / L'open space vit une dépression / L'orage gronde à la réception / Sens-tu ce parfum, cette brise ? / C'est le souffle de l'entreprise./ Et s'il t'emporte loin d'ici / Tu s'ras à Pôle Emploi mardi. »


  La horde est en marche. Après avoir identifié les problèmes, les consultants sont bien décidés à optimiser la performance d’Ordi+© et ont organisé pour cela un atelier pour définir l’objectif. Ils y mettent les moyens : pas moins de cinq ceintures noires du processus sont mobilisées sur la mission.

René, qui s’est déjà vu sucrer ses primes par Cindy, qui a mis au grand jour son inefficacité, décide d’y envoyer Sylvain, le stagiaire sur qui il pourra se défouler si une erreur est commise.

  Il faut savoir que Sylvain a légèrement les dents qui rayent le parquet et qu’il aime les défis. N’ayant de toute façon jamais rien compris au grec, il propose avec les consultants de se fixer une tolérance ΔX de deux jours. Cindy, ayant bien vu que René n’a pas participé à la réunion pendant qu’elle-même débriefait son week-end à Perros-Guirec avec Sophie la livreuse, a bien compris que l’objectif ne serait pas atteignable. Pour ceux qui ont suivi4, cela revient en effet à dire que la méthode sera réussie si l’écart type est d’un tiers de journée (σ=ΔX/6). Elle décide donc de prendre des congés bien mérités pendant la période d’observation. René, trop occupé à chercher des Ordi+© dans la réserve, n’a pas le temps de gérer tout cela, et pour cause : les commandes sont déjà en retard. Une semaine plus tard, les résultats sont terrifiants ! On obtient alors ceci :

 

  « C’est terrible, s’exclament les black belt du lean six sigma, votre entreprise ne réalise même pas un objectif de deux sigma : la tolérance de deux jours ne sera jamais atteinte ! ». Ne comprenant pas grand-chose à ce schéma, dont on se demande même parfois si les consultants l’ont bien compris eux-mêmes, Cindy acquiesce : « Effectivement ! A chaque fois que je pars en vacances, nous ne tenons pas le objectifs de var… de sig… enfin, quels que soient leurs noms, nous ne les tenons pas ! » 

  Le verdict est implacable : René n’est pas capable de tenir seul les objectifs. Quand celui-ci rétorque que c’est le stagiaire qui les a fixés, tout le monde lui rit au nez. « Qui aurait eu la bêtise de donner une telle responsabilité au stagiaire ? Soyons sérieux », lui répliquent les Black Belts.

La solution est simple : il va falloir mettre en place un projet5, en collaboration avec la livraison, dirigée par Stéphane, pour pallier l’incompétence de René. Cette fois, ce seront le cycle en V et les méthodes agiles qui permettront aux consultants de remplacer René par un système plus performant.

  Morale de l’histoire : la prochaine fois, René se fixera lui-même ses propres objectifs. Ça lui évitera de ne pas répondre à ceux imposés par quelqu’un d’autre !


René arrivera-t-il cette fois à déjouer les méthodes des consultants et à faire payer Sylvain ? Pourra-t-il inviter Cindy à boire un verre ? Stéphane du service livraison est-il vraiment quelqu'un de confiance ? Ne manquez pas le prochain épisode du Souffle de l'entreprise ! 


 

 


1. … ou pour les littéraires pur souche.

 

2. C'est bon, tout le monde suit bien ?

 

3. Et pour ceux qui ont raté l'itinéraire de découverte sur Star Wars, rappelons qu'un padawan est un apprenti, et qu'un maître Jedi est… un maître, comme son nom l'indique.

 

4. Il y en a ?

 

5. Amis profs, vous voyez : ailleurs aussi, la pédagogie de projet a frappé ! 

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4 août 2011 4 04 /08 /août /2011 15:22

orages

Été 1990 ! Ça ne nous rajeunit pas ! 

 

 

 

Les Professeurs foudroyés (saga de l'été 2021)

Une saga de Bruno Julliard, avec Lorie (Laura), Jordy (Julien), Loana (Mme Zutlu), Kad Merad (M. Bota), Amy Winehouse (la dernière bonne élève de l'établissement).

Musique du générique : Christophe Maé

 

 

Épisode 1 : Didactique du processus interdisciplinaire

 

Générique : « L'orage a frappé le collège / Les éclairs se mêlent à la neige / la bourrasque des sentiments / Souffle et tout le monde se ment / Dans cet univers déchiré / Vois les professeurs foudroyés / Amour, savoir et trahisons / Et nuages à l'horizon » (rajoutez quelques "da da da dam, whoho !", puisque c'est Christophe Maé qui chante) 

 

  Rien ne va plus au collège Philippe Meirieu de Sainte-Geneviève-des-Bois. Les résultats du DNSC1 sont en chute libre, puisque seuls 95% des élèves l'ont eu l'année précédente, ce qui est nettement en dessous de la moyenne académique (99,4%). À qui la faute ? À Laura, jeune professeure2 de français contractuelle dotée d'un bac +10 et payée au SMIC ?  À Julien, diplômé en sciences de l'éducation et formateur à l'IUFM Créteil/McDonald's/Société Générale/Soupline3 ? Pour voir ce qui ne fonctionne pas, M. Bota, Principal de l'établissement, et Mme Zutlu (qui trouve Julien très séduisant et souhaiterait entreprendre un projet pédagogique avec lui), son adjointe, font donc appel à des consultants, qui, après plusieurs interviews, leur livrent ça : 

 

Diapositive1bis

 

 

  La réponse au problème est donc flagrante : l’objectif de faire apprendre l'accord du participe passé à Kévin-Edward en un an n’est pas atteint, d’où le mécontentement des parents. Laura fera donc probablement partie du prochain plan de mutation autoritaire vers l'établissement pénitentiaire de Sarcelles/Argenteuil pour avoir balancé son collègue Julien en l'accusant de surnoter le devoir commun. « Pas du tout, a rétorqué Mme Zutlu : il se met au niveau des élèves ! ». Et si jamais Laura accuse sa direction en plein conseil pédagogique, c’est qu’elle manque d’esprit transdisciplinaire et constructiviste, et n’y a donc plus sa place.

  Morale de l’histoire : la prochaine fois, Laura fixera des objectifs moins ambitieux, tels que distinguer les différentes lettres de l'alphabet, à l'exception des lettres rares (g, h, j, k, q, u, v, w, x, y, z). M. Bota pourrait ainsi apprécier son investissement didactique, et la promouvoir coordinatrice des pratiques pédagogiques du niveau 5ème, ce qui lui octroierait une prime de 50€ par an, bien utile pour rembourser le crédit à la consommation à 17,9% qu'elle a dû souscrire pour louer une chambre de bonne.

 

Comment le collège Philippe Meirieu va-t-il réussir grâce à d’autres consultants à optimiser sa performance ? Mme Zutlu et Julien se retrouveront-ils enfin seuls dans le local photocopieuse ? Laura a-t-elle vraiment trouvé le poste de ses rêves ? Ne manquez pas le prochain épisode des Professeurs foudroyés ! 

 

 


1. Diplôme National du Socle Commun, qui a remplacé le brevet des collèges en 2016.

 

2. Orthographe rénovée en 2018.

 

3. Les IUFM ont été rouverts en 2016, avec financements privés, sous contrôle de l'OCDE.

 


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2 août 2011 2 02 /08 /août /2011 10:52

brûlés 

      Été 1992 : souvenez-vous…

 

 

Le Souffle de l'entreprise

Une saga de Josée Dayan, avec Pierre Arditi (René), Laurence Boccolini (Cindy), Lorànt Deutsch (Sylvain). Musique du générique : André Manoukian.

 

Épisode 1 : Processus enclenché


  « Pour mieux faire marcher une entreprise, il faut d’abord la connaître ». Derrière la naïveté de cette phrase se cache l’une des principales difficultés de l’optimisation de performance. Le « qui fait quoi ? » d’une entreprise est rarement connu au sein des divisions, ce qui pose des problèmes quand on veut mieux rentabiliser le « quoi ? ». Pour cela, il existe les… processus ! C’est l’outil de base du consultant : cartographier des processus ou s’appuyer dessus lorsque ceux-ci existent pour optimiser la performance.


  Le processus, c’est le « qui fait quoi ? ». La procédure associée nous indiquera le « comment ? ». À chaque processus est en général adossé un pilote — le chef — et des ressources, chargées d’accomplir les procédures. Tout ceci est ensuite suivi par des indicateurs de contrôle qui nous donnent la performance du processus (le temps mis pour répondre à une demande, le pourcentage de réussite, le nombre d’articles pourris publiés sur un blog, etc.).


  Regardons sur un exemple précis.

 


Générique : « Dans les couloirs, dans les bureaux / Parfois il ne fait pas très beau / L'open space vit une dépression / L'orage gronde à la réception / Sens-tu ce parfum, cette brise ? / C'est le souffle de l'entreprise./ Et s'il t'emporte loin d'ici / Tu s'ras à Pôle Emploi mardi. »


  Une société vend des Ordi+©, le seul ordinateur du marché qui ne plante jamais. Pour ça, à chaque fois qu’un client commande un Ordi+©, René, répondant aux ordres de Cindy, regarde dans la réserve ce qui leur reste, puis l’envoie à Sophie pour livraison, elle-même répondant aux ordres de Stéphane. Simple. Seulement, les commandes arrivent en retard. À qui la faute ? Trop facile d’accuser Sylvain, le jeune stagiaire pour qui Cindy en pince : il vient d’arriver. Pour voir ce qui ne fonctionne pas, les dirigeants font appel à des consultants qui, après plusieurs interviews, leur livrent ça :

 

 

Diapositive1

 


  La réponse au problème est donc flagrante : l’objectif de trouver un Ordi+© dans la réserve en trois jours n’est pas atteint, d’où les retards. René fera donc probablement partie du prochain plan de réduction des budgets pour avoir balancé sa chef Cindy qui lui donne toujours les commandes en retard. Et si jamais René accuse Cindy, c’est qu’il manque d’esprit d’entreprise, et n’y a donc plus sa place.

  Morale de l’histoire : la prochaine fois, René demandera à Sylvain de répondre aux questions des consultants. Cindy aurait ainsi pu se rendre compte de sa traîtrise et enfin regarder René… mais c’est une autre histoire !

 

 

Comment la société Ordi+© va-t-elle réussir grâce à d’autres consultants à optimiser sa performance ? René et Cindy se retrouveront-ils enfin seuls dans le local photocopieuse ? Sylvain est-il homosexuel ? Ne manquez pas le prochain épisode du Souffle de l'entreprise ! 

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31 juillet 2011 7 31 /07 /juillet /2011 09:41

oliviers

Été 1993 : souvenez-vous… 

 

 

 

Par Stan Retors, le consultant qui ne vous fera aucun tort

 

  C’est l’été. Alors que votre chaîne préférée a déprogrammé Joséphine, Ange gardien pour cause de période estivale en le remplaçant par un programme douteux, le blog Je Suis en retard vous propose également de changer d’air. Voici donc, pendant que les professeurs sont en vacances1, la saga de l’été du blog, en collaboration avec l’anonyme Stan Retors.


  Le synopsis est simple : Stan Retors est consultant dans une entreprise internationale de conseil. Un soir, il raconte à son ami Celeborn, professeur de français en collège, l’ensemble des méthodes auxquelles il a recours pour améliorer la performance des entreprises. Au milieu d’un baratin invraisemblable et voyant que Stan ne manque pas de méthodes obscures, dont certaines sont déjà appliquées à l’éducation nationale, Celeborn a une idée : écrire avec lui sur son blog les directives qui seront sans doute appliquées à l’Éducation Nationale dans 10 ans. Pour les prévoir, il suffit de partir du grand principe que l’Éducation Nationale a toujours 10 ans de retard sur le monde de l’entreprise, dont on veut absolument étendre tous les principes. Stan Retors, en tant que consultant reconnu de son milieu, pourra ainsi expliquer les différentes méthodes qu’il utilise au quotidien pour améliorer les performances des entreprises pendant que Celeborn n’aura qu’à réfléchir au moyen de les appliquer à son collège pour pouvoir projeter ce que sera, peut-être, l’école de demain.


  Alors que les indicateurs de performances et les primes au mérite ont déjà pris place dans le milieu, qu’est ce qui attend demain l’éducation nationale ? Les cartographies de processus, le lean six sigma, le net promotter score ou encore les fameuses méthodes de gestion agile des projets pourront-elles trouver leur place chez nos amis les professeurs ? Série à suivre…

 

 

 

Par le taulier

 

  Aimés lecteurs, adorées lectrices, le blog Je Suis en retard ne recule devant aucun coût de production et vous propose non pas une, mais bien deux sagas de l'été, en parallèle :

 

  • Le Souffle de l'entreprise (par Stan Retors), saga de l'été 2011, diffusée sur TF1 le vendredi soir en prime time. Trahisons, coups bas, amour et infidélités au cœur de la société Ordi+©.

 

  • Les Professeurs foudroyés (par votre serviteur), saga de l'été 20212, diffusée sur France 4 le lundi à minuit 20. Trahisons, coups bas, amour et infidélités au cœur du collège Michel Houellebecq3.

 

  Nous espérons faire exploser les chiffres de l'audimat et ne laisser à M6 que 2% de part de marché ! Alors devant vos écrans : les feuilletons vont bientôt commencer ! 

 

 

 


1. Encore ! Saleté de fonctionnaires feignasses ! 


2. La machine à explorer le temps du blog fonctionne donc toujours très bien.


3. Bon, la machine à explorer le temps du blog a peut-être quelques ratés, tout de même.

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  • : Un professeur pas toujours à l'heure analyse le pays des merveilles dans lequel il est tombé. Réformes, administration, parents, élèves, collègues, formateurs : Lewis Carroll n'a qu'à bien se tenir !
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